Mort de Jean-Emile Rebattu, assassinat ou accident ?
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L'affaire Fabrice André : 1054 jours de prison pour rien
https://www.ledauphine.com/haute-provence/2010/07/20/fabrice-andre-faites-entrer-l-innocent
L’histoire d’un homme accusé à tort. Heureusement acquitté en mai 2000, à l’issue de son procès pour meurtre. Mais s’il s’agissait bien d’un meurtre, cela veut dire que depuis 19 ans un assassin est en liberté !
A la Une de "L’heure du crime", l’histoire d’un homme, Fabrice André, accusé du meurtre de son employeur, Jean-Emile Rebattu, qui l’employait dans sa bergerie de la vallée de l’Ubbaye, à Jausiers, dans les Alpes de Haute-Provence.
Fin Octobre 1994, Jean-Emile Rebattu est retrouvé mort, le crâne fracassé, à l’intérieur de sa bergerie où il travaillait à la réfection du toit de ce bâtiment, à la suite d’un grave incendie.
Les gendarmes appelés sur les lieux vont d’abord évoquer la thèse de l’accident. Le propriétaire de la bergerie aurait perdu l’équilibre sur des poutres glissantes. Mais l’autopsie retiendra également une seconde hypothèse, celle d’un meurtre consécutif à un coup à la tête.
L’enquête va basculer très rapidement lorsqu’un berger voisin accuse Fabrice André d’avoir tué son employeur. Il s’agirait donc bien d’une affaire criminelle ! Tous les proches de la victime sont mis sous surveillance, et les enquêteurs constatent l’existence d’une relation amoureuse entre Fabrice Andrée et Jocelyne l’épouse de Jean-Emile Rebattu.
C’est alors l’hypothèse d’un crime passionnel qui est retenue. Elle apporte surtout un mobile. L’amant, peut-être avec la complicité de l’épouse aurait supprimé le mari gênant.
Cette émission revient en détail sur les nombreux rebondissements de cette affaire qui a valu à Fabrice André 1054 jours de prison pour rien. Car les accusations vont s’écrouler au cours du procès. Fabrice André sera acquitté définitivement en Mai 2000.
S’il s’agissait bien d’un meurtre, et non d’un accident, cela voudrait dire que depuis 19 ans, un assassin est en liberté !
20 juil. 2010 — Didier Lucien, le codétenu à qui Fabrice André aurait confié être l'assassin dans la cour de promenade de la prison, le blanchit également.
Le 5 mai 2000, la cour d’assises des Alpes de Haute-Provence, à Digne-les-Bains, acquitte Fabrice André, qui avait été accusé du meurtre de son employeur Jean-Emile Rebattu dans sa grange de Jausiers en octobre 1994. Le berger qui a toujours clamé son innocence est définitivement blanchi. Le parquet ne fait pas appel. Pourtant, l’avocat général avait requis vingt ans de réclusion criminelle, estimant que Fabrice André avait « tué de sang froid ». Dix ans plus tard, l’émission estivale de M6 “Accusé à tort” revient sur cette drôle d’affaire criminelle que personne n’a oublié dans la vallée de l’Ubaye. Elle est diffusée ce soir à 22h50.
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Fabrice André a passé trois ans en prison pour un crime qu’il n’a pas commis.
«J’ai fait très exactement 1054 jours de détention à cause de l’acharnement d’un juge d’instruction alors que le dossier était vide » raconte Fabrice André. « Les charges contre Fabrice André étaient inconsistantes » confirme M e François Chevallier, un de ses deux avocats devant la cour d’assises. « D’ailleurs, la chambre de l’instruction l’avait déjà remis en liberté plusieurs fois ».
Selon l’avocat, un détail ne trompe pas. Fabrice André était tellement sûr d’être acquitté qu’il s’est endormi du sommeil du juste et de l’innocent pendant que le jury délibérait. Au cours de l’audience, le dossier d’accusation finit par s’écrouler complètement.
Les deux seuls témoins à charge innocentent Fabrice André. Dans l’émission de M6, Auguste Aubert, le voisin de Jean-Emile Rebattu à Jausiers, est très clair : «Pourquoi j’aurais accusé Fabrice André ? Il faut le voir pour l’accuser et je n’ai vu personne ». Didier Lucien, le codétenu à qui Fabrice André aurait confié être l’assassin dans la cour de promenade de la prison, le blanchit également. Il dit avoir fait un faux témoignage en échange de sa remise en liberté. Devant les caméras de M6, M e Gilbert Collard, l’avocat de la famille Rebattu, dénonce aujourd’hui « une magouille du juge d’instruction ».
S’il n’en avait pas été lui-même victime, Fabrice André s’amuserait presque des péripéties qui ont marqué l’histoire du palais de justice de Digne-les-Bains. « Il y a eu l’affaire Gaston Dominici et l’affaire Richard Roman et puis la mienne. A mon avis, Digne doit détenir le record de France des affaires rocambolesques et des instructions ratées ». Depuis son acquittement, Fabrice André s’investit dans plusieurs associations qui militent pour l’amélioration des conditions de vie des détenus et pour une réforme de la justice.
« Mon cas fait école. Il va être étudié à l’école nationale de la magistrature à Bordeaux pour voir comment on construit une erreur judiciaire » annonce celui qui a croisé Bernard Tapie lorsqu’il était incarcéré au quartier VIP de la prison de Luynes. Fabrice André reconnaît que son arrogance l’a desservi pendant l’instruction.
« Je corrigeais les fautes d’orthographe du juge et je lui avais décerné un bonnet d’âne lorsque la chambre de l’instruction m’avait remis en liberté. Il ne me l’a pas pardonné et l’instruction a tourné au règlement de comptes entre un juge et un détenu ».
Fabrice André a obtenu une indemnisation de 24 000€ pour les trois ans qu’il a passés derrière les barreaux. « J’ai également touché une enveloppe confidentielle sur les fonds spéciaux du ministère de la Justice, à condition de retirer ma plainte devant la cour européenne des droits de l’homme » précise-t-il. L’épilogue judiciaire devant la cour d’assises laisse un goût d’inachevé.
Jean-Emile Rebattu est-il mort accidentellement après avoir chuté du toit de sa grange ? Si c’est un meurtre, qui l’a tué ? « Les experts et les médecins légistes ont conclu à une cause criminelle. Je n’en suis pas convaincu. Mais si c’est un meurtre, ce crime risque bien de rester inexpliqué » commente François Chevallier, l’ex-avocat de Fabrice André.
A la fin du reportage de M6, Jocelyne Rebattu, la veuve de Jean-Emile, avoue « une rancune contre la justice qui n’a pas fait son travail ».
C’est sans doute la principale leçon à tirer de l’affaire Fabrice André.
Source
Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 12 mai 1999, 99-81.170, Inédit AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le douze mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller PALISSE, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :- X... Fabrice,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 13 janvier 1999, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises des ALPES DE HAUTE-PROVENCE sous l'accusation d'assassinat ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 198, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable le premier mémoire adressé à la chambre d'accusation dans l'intérêt de Fabrice X... par Me François Chevallier, avocat, le 30 décembre 1998 ;
" au motif que ce mémoire est dépourvu de la signature de son auteur ;
" alors que, lorsque comme en l'espèce, un mémoire est régulièrement transmis à la chambre d'accusation par une lettre portant le timbre d'un avocat et la signature de celui-ci, cette lettre forme avec le mémoire un tout indivisible en sorte qu'en déclarant irrecevable le mémoire enregistré le 30 décembre 1998, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés " ;
Attendu que dans son mémoire, l'avocat de Fabrice X... demandait, à titre principal, que soit prononcée une décision de non-lieu ou, à titre subsidiaire, que soit ordonné un supplément d'information ;
Que, pour prononcer le renvoi de Fabrice X... devant la cour d'assises, l'arrêt attaqué, après avoir exposé les faits, énonce que l'existence d'un mobile, les mensonges de Fabrice X..., les lacunes dans son emploi du temps et les résultats des examens médicaux constituent des charges sérieuses d'assassinat ; qu'il ajoute que l'enquête apparaît complète tant sur l'état médical antérieur de la victime que sur l'entourage de celle-ci et celui de Fabrice X... de sorte qu'un supplément d'information serait inutile ;
Qu'ainsi, même si elle a déclaré à tort irrecevable le mémoire, auquel une lettre de transmission signée de son auteur était jointe, la chambre d'accusation a répondu aux articulations essentielles qu'il contenait ;
Que dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 221-1 et 221-3 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la mise en accusation de Fabrice X... devant la cour d'assises du chef d'homicide volontaire avec préméditation ;
" aux motifs que les différents experts médecins-légistes excluaient clairement la thèse de l'accident en indiquant que seules les blessures dorsales et costales de la victime pouvaient avoir été causées par une chute d'une hauteur de 2, 80 mètres, les fractures crâniennes mortelles quant à elles révélant des atteintes multiples par objet contondant ; que les constatations effectuées sur place étayaient cette certitude, Jean-Emile C... ayant été découvert face contre terre alors qu'il présentait des plaies au sommet du crâne et son corps n'ayant pas été déplacé ou retourné ; que d'autres éléments venaient charger Fabrice X... ; que tout d'abord, Fabrice X... avait été le premier à découvrir le corps de Jean-Emile C...,
le 20 octobre 1994 à 4 heures 15 du matin dans des conditions pour le moins surprenantes ; que prévenu de la disparition de Jean-Emile C..., il se rendait directement à la bergerie dans laquelle il pénétrait en courant, les lieux étant particulièrement sombres et encombrés, pour découvrir très rapidement le corps de Jean-Emile pourtant invisible sans éclairage ; qu'ayant touché la victime, il disait avoir eu du sang sur la main et avait même dit aux enquêteurs, " j'ai tout de suite pensé qu'il était mort " ; que pourtant il ne prévenait pas les secours et se rendait chez Robert D... pour chercher des couvertures, lui recommandant en outre de ne pas prévenir les pompiers immédiatement ; quant à son emploi du temps le 19 octobre 1994, Fabrice X... indiquait avoir mangé au domicile de la victime à 12 heures en compagnie de Robert D..., Jocelyne C... et Jean-Emile C... puis s'être rendu à la bergerie pour y effectuer des travaux sur la charpente jusqu'à 17 heures 10, heure à laquelle il partait, laissant Jean-Emile sur le chantier et raccompagnant M. B... à son domicile ; que ce dernier confirmait la présence de Fabrice X... chez lui jusqu'à 18 heures environ ; que le berger prétendait être allé ensuite directement au bar de Serge C... à Jausiers afin de lui réclamer le prêt d'une bétonnière dont on sait qu'elle n'était plus utile, les travaux étant presque terminés ; qu'il soutenait y être resté environ une heure pour regagner le domicile du couple
C... à 18 heures, ce qui s'avérait inexact puisque plusieurs témoins déclaraient que Fabrice X... n'était pas présent au bar à 18 heures 30 et qu'il n'était arrivé qu'à 18 heures 45 ; que Serge C... quant à lui, soulignait que la présence de Fabrice X... dans son établissement l'avait étonné, ce dernier n'y venant jamais ; qu'il apparaissait en conséquence que de 18 heures 15 à 18 heures 45, Fabrice X..., incapable de justifier de son emploi du temps, avait pu se rendre à nouveau à la bergerie pour y assassiner Jean-Emile C..., les experts quant à eux indiquant que le décès avait eu lieu le 19 octobre 1994 avant 21 heures ; que des chronométrages des différents trajets étaient par ailleurs réalisés et révélaient que ce détour par la bergerie était tout à fait possible ;
que, quant aux raisons qui pourraient avoir poussé Fabrice X... à tuer Jean-Emile, elles trouvaient leur origine dans la liaison qu'entretenait le berger avec Jocelyne C..., liaison débutée bien avant le décès de Jean-Emile selon divers témoignages etqu'il apparaissait clairement que Fabrice X... désirait vivre avec Jocelyne et reprendre ainsi l'exploitation C... ; qu'en effet, au début du mois d'octobre 1994, il avait écrit à son ancienne amie, Mme E..., qu'il avait l'intention de vendre sa maison dans le Jura et de s'installer à Jausiers ; qu'enfin, l'attitude de Fabrice X... tout au long de l'enquête, était pour le moins suspecte ; qu'il contactait tout d'abord différents témoins pour les persuader de confirmer ses déclarations, tentait auprès des gendarmes d'accréditer la thèse d'un accident, puis d'un suicide, d'un règlement de comptes pour finir par accuser Robert D... d'avoir assassiné Jean-Emile ; que l'existence d'un mobile, la " découverte du corps ", les nombreux mensonges tant de Fabrice X... que de Jocelyne C..., les trous dans son emploi du temps et les examens médicaux qui concluent à l'existence de violences permettent de considérer qu'il existe des charges sérieuses contre Fabrice X... du chef de meurtre avec préméditation ;
" 1) alors qu'il résulte de ces énonciations que l'imputabilité du meurtre prétendu au demandeur ne résulte que de motifs hypothétiques, insusceptibles en tant que tels de justifier une décision de mise en accusation ;
" 2) alors que ces motifs ne permettent pas de caractériser à la charge du demandeur la circonstance aggravante de préméditation, laquelle suppose nécessairement le dessein formé avant l'action, l'existence d'un " mobile " étant insuffisante à elle seule à caractériser ce dessein " ;
Attendu que l'arrêt relève notamment que, quelques jours avant la mort de Jean-Emile C..., Fabrice X... aurait écrit à une amie qu'il allait s'installer à Jausiers et que, par la suite, il aurait confié à un codétenu qu'il avait décidé de se débarrasser de la victime en raison du caractère violent de celle-ci et parce qu'il était son rival ;
Que la chambre d'accusation en a déduit souverainement, sans insuffisance ni contradiction, qu'il existait des charges suffisantes de meurtre avec la circonstance aggravante de préméditation et qu'il ne peut lui être fait grief d'avoir exposé partie des faits au mode conditionnel dès lors que, si elle doit examiner les charges, elle ne peut prononcer sur la culpabilitéD'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que la chambre d'accusation était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle l'accusé a été renvoyé, que la procédure est régulière et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE le pourvoi ;Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Gomez président, M. Palisse conseiller rapporteur, MM. Guilloux, Le Gall, Farge, Pelletier, Mme Ponroy conseillers de la chambre, M. Sassoust, Mme Caron conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Géronimi ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Sa femme et un avocat pensent que Jean-Emile a été assassiné et demande la réouverture du dossier.

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